LES ARBRES SE SOUVIENNENT D’UNE TEMPÊTE SOLAIRE DE L’ÈRE GLACIAIRE
Le 23/05/2025
Il y a plus de 14 000 ans, une tempête solaire si puissante s’est produite que les arbres s’en souviennent encore. Bien plus intense que les tempêtes modernes, un tel événement aujourd’hui causerait des ravages technologiques. Alerte spoiler : c’est possible.
Texte : Arbres subfossiles le long des rives de la rivière Drouzet en France [réf]
Cette tempête exceptionnelle est décrite dans un article à paraître en juillet 2025 dans la revue à comité de lecture Earth and Planetary Science Letters. Elle a eu lieu en 12 350 av. J.-C. et est classée comme un « Événement Miyake« .
Les événements Miyake sont des tempêtes solaires qui font paraître celle de Carrington de 1859 dérisoire. Les arbres les « mémorisent » dans leurs cernes, qui conservent le carbone 14 produit par ces tempêtes colossales. Au moins six événements Miyake ont été découverts et confirmés depuis que Fusa Miyake a identifié le premier en 2012. La liste comprend 664-663 av. J.-C., 774 apr. J.-C., 993 apr. J.-C., 5259 av. J.-C., 7176 av. J.-C., et 12 350 av. J.-C.
L’événement Miyake de 12 350 av. J.-C. est particulièrement intrigant. Il apparaît sous forme de pic de carbone 14 dans des pins sylvestres près de la rivière Drouzet en France, avec un pic de béryllium 10 correspondant dans les carottes de glace du Groenland. L’événement était global et, d’après l’ampleur des pics, très important.
Au début, personne ne pouvait déterminer la taille exacte de la tempête, car elle a eu lieu durant l’ère glaciaire.
Le stockage du carbone 14 est complexe. Lorsqu’une tempête solaire en produit dans la haute atmosphère, ce radio-isotope n’apparaît pas immédiatement dans le bois des arbres. Il faut plusieurs mois voire années de circulation atmosphérique, influencée par le climat et la géographie, avant qu’il n’atteigne l’arbre durant sa saison de croissance. Sinon, il n’est pas « absorbé ». Les arbres de haute altitude sont privilégiés car ils rencontrent le carbone 14 plus tôt, et chaque espèce a sa propre sensibilité.
Tous ces facteurs sont plus difficiles à démêler durant l’ère glaciaire. La plupart des événements Miyake connus se sont produits après cette période, durant l’Holocène, une ère de climat stable et chaud ayant commencé il y a environ 12 000 ans. Les scientifiques disposent de modèles de circulation atmosphérique pour l’Holocène, ce qui facilite l’interprétation des événements en 7176 av. J.-C., 5259 av. J.-C., 664-663 av. J.-C., 993 apr. J.-C., 774 apr. J.-C. Ce n’est pas le cas pour celui de 12 350 av. J.-C.
Pour résoudre ce problème, Kseniia Golubenko et Ilya Usoskin de l’Université d’Oulu en Finlande ont développé un modèle climat-chimie (SOCOL:14C-Ex) spécialement conçu pour les tempêtes solaires de l’ère glaciaire. Il prend en compte les limites des calottes glaciaires, les niveaux marins et les champs géomagnétiques de la période glaciaire tardive du Pléistocène. Grâce à ce modèle, ils ont pu interpréter les données des cernes pour l’année 12 350 av. J.-C.
Selon leur article, l’événement de 12 350 av. J.-C. est le plus grand jamais identifié. Il a produit une pluie de particules solaires 500 fois supérieure à la plus forte enregistrée par les satellites modernes en 2005. Lors de l’événement de 2005, un passager aérien survolant les pôles aurait reçu en une heure la dose de rayonnement cosmique équivalente à une année au niveau de la mer. En 12 350 av. J.-C., la même dose aurait été reçue en huit secondes à peine.
Cela semble établir un nouveau standard pour les scénarios extrêmes de météo spatiale. Toutefois, l’essentiel est ailleurs : la porte de l’ère glaciaire a été ouverte par SOCOL:14C-Ex. Les anciens cernes d’arbres peuvent désormais être interprétés avec précision, révélant potentiellement des tempêtes encore plus violentes.
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